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Pierre Fleury : Interview avec l'artiste equestre

Depuis son passage dans l’émission « La France a un incroyable talent » en 2011, Pierre Fleury est devenu un professionnel accompli présentant ses spectacles de chevaux en liberté aux quatre coins de l’Europe, comme lors du dernier Jumping International de Vichy ou du CSI 4* de Poznan. Il se fait notamment connaître grâce à des vidéos amusantes mettant en scène ses chevaux en liberté et partagées sur sa page Facebook. Ce que l’on sait un peu moins, c’est que Pierre est très attentif au bien-être de ses chevaux, une condition selon lui indispensable pour être performant - en spectacle ou en équitation sportive. Cheval-energy.com a donc cherché à le rencontrer, pour mieux connaître, et vous faire connaître, sa vision d’une relation équilibrée avec nos chevaux.

Pierre, comment en es-tu venu à cette relation très spéciale avec tes chevaux et à faire du spectacle équestre ton métier ?

Mes deux premiers chevaux, Nessy et Nelson, ont été achetés à 3 ans par mon père pour faire de l’attelage. Après plusieurs chutes, je m’étais éloigné de l’équitation et c’est le travail à pied qui m’a permis d’y revenir. Cela correspondait aux débuts de l’éthologie en France, dans les années 2000, et j’ai pu y trouver des connaissances sur le fonctionnement du cheval ainsi que des idées d’exercices pour approfondir le travail avec chacun de nos chevaux. Par la suite, j’ai découvert la poste hongroise et le tandem, ce qui m’a permis de commencer à les travailler ensemble. Je leur ai également appris un ensemble de figures de spectacle, même si à ce moment-là je n’avais pas d’objectif de représentations. Nous avons finalement donné notre tout premier spectacle lors du rassemblement de la race Highland dont font partie Nessy et Nelson. L’émission « La France a un incroyable talent » a plus tard été un véritable tremplin pour me lancer en tant que professionnel.

Peux-tu nous dire à quoi ressemble l’une de tes journées avec tes chevaux ?

A l’écurie, le planning est variable selon que nous sommes en préparation de spectacle ou en phase d’apprentissage de nouvelles figures. J’aime passer du temps avec mes chevaux plusieurs fois dans la journée en parallèle des séances de travail qui ont lieu une à deux fois par jour. Je les emmène également régulièrement à la plage ou en balade en extérieur. De mon côté, je dois également gérer l’écurie : travaux, bricolage, entretien, administratif.

Lorsque je pars en spectacle, l’organisation est très différente car je me focalise uniquement sur les chevaux. Je fais en sorte qu’ils se sentent comme à la maison en les sortant, en leur donnant la possibilité d’être ensemble et de brouter en extérieur afin qu’au moment du spectacle ils soient disponibles et connectés à moi. Nous avons également des répétitions prévues pour les habituer à la piste, la lumière et la musique.

Est-ce que devenir professionnel du spectacle a changé ta relation avec tes chevaux ? La performance est-elle compatible avec le bien-être ?

Au début, cela a effectivement changé ma relation avec eux car les exigences du spectacle étaient plus importantes. Il nous a fallu un temps d’adaptation et j’essaye maintenant de leur rendre autant que ce qu’ils me donnent, notamment en passant plus de temps avec eux - par exemple à faire du grooming. L’objectif est pour moi qu’ils me perçoivent comme un congénère et de leur apporter du bien-être pour que la relation reste équilibrée. Même lorsque je suis exigeant avec eux, j’essaye de leur apporter suffisamment pour qu’ils soient bien dans leur tête - en plus de leur offrir un cadre de vie le plus naturel possible.

Quels types de soins utilises-tu pour tes chevaux ? Comment gères-tu leur vie au pré ?

Les chevaux vivent au pré à l’herbe, ou au foin en période hivernale. Je leur donne des pierres à sel pour les complémenter et ils sont vermifugés et vaccinés car nous nous déplaçons beaucoup à l’étranger. J’utilise aussi des herbes pour les chevaux stressés ou des compléments spécifiques pour les jeunes chevaux. J’applique le principe de la prévention : assurer le bien-être du cheval au quotidien grâce à un mode de vie proche de ses besoins. Cela permet de minimiser les problèmes de santé et donc les dépenses vétérinaires. Par exemple, en mettant en place des filets à foin plutôt qu’une distribution en vrac, j’ai pu passer le premier hiver sans colique depuis plusieurs années.

Par ailleurs, je mets en place petit à petit une écurie active à la maison pour les rapprocher d’un mode de vie naturel été comme hiver. Cela réduit les risques de problèmes mais aussi la pénibilité et la charge de travail pour moi.

Comment gères-tu le stress de tes chevaux (déplacements, spectacles, lumière, sons, public…) ?

Là encore, je suis plutôt dans l’anticipation : j’habitue progressivement mes chevaux aux différents éléments potentiellement source de stress. Je sors les jeunes chevaux à l’extérieur, d’abord sans lumière ni musique, en compagnie de chevaux plus âgés. Lorsque la technique est acquise, je peux mettre en place progressivement de la musique, du public et des lumières lors du travail à la maison.

La plage est aussi une bonne préparation car on peut y rencontrer de nombreux éléments inhabituels. J’essaie de faire en sorte que lors d’une sortie, les conditions soient réunies pour permettre au cheval de découvrir de nouvelles choses progressivement.

On parle beaucoup de bien-être dans le monde équestre aujourd’hui, qu’en penses-tu ?

En effet, les mentalités changent pour le mieux au sujet du bien-être du cheval. Beaucoup des cavaliers qui rencontrent des problèmes de comportement avec leurs chevaux devraient s’y intéresser de plus près.

Un conseil pour les clients de cheval-energy.com qui perdent parfois la connexion avec leur cheval, en concours ou à la maison ?

Il faut justement revenir au principe de progressivité et se remettre en question lorsque quelque chose bloque. Il ne faut pas hésiter à revenir à des choses plus simples et scinder l’objectif en plusieurs étapes pour y aller petit à petit.

Mon autre conseil est aussi d’habituer les chevaux aux situations qui peuvent être sources de stress : si je souhaite embarquer mon cheval dans un van sans heurts, je dois l’y préparer pendant plusieurs jours avant l’échéance pour qu’il s’habitue et que cette situation soit banalisée dans son quotidien. Cela permettra de réduire son stress.

Parfois, il ne faut pas hésiter à se faire aider par un professionnel compétent pour régler une situation compliquée. Cela permettra de se focaliser uniquement sur l’objectif de travail (enchainer son parcours, réaliser un exercice…) sans avoir à gérer un stress dû à des éléments annexes. 

Merci à Pierre pour son temps et le partage de sa vision du bien-être équin que nous partageons au sein de Cheval-energy.com. Pierre est également un fervent défenseur de l’Ecurie Active !

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